La Cave

 

De cave, elle est devenue La Cave.

Presque centenaire, la Cave n'est plus aujourd'hui une cave au sens utile.

Pour autant, elle a conservé son âme.

Oublié, l'empilement sourd des comportes de bois.

Apaisé, l'emballement du fouloir goulu de raisins.

Silencieux, le ronronnement serein de la pompe.

Envolé, le cliquetis du pressoir élevant l'offrande du lourd gâteau de marc ruisselant du premier vin.

Evaporées, les effluves du moût chaud en train de devenir vin.

Fanè, le vermeil étincelant du vin nouveau délivré par le robinet de cuivre.

Muettes, les paroles étouffées, échappées de la cuve ouverte.

Disparu le passant venu causer dans l'entrebâillement de la porte.

Tue à jamais, la voix forte de Galdigrou, le maître des lieux.

La plupart des objets qui, d'antan, ont aidé à faire le vin, sont restés à leur place, ancrés dans la fidélité du serviteur.

Mystérieux ou évocateurs.

Désormais plus beaux qu'utiles, ils sont toujours la vie de la cave, un fragment de son âme.

 

A présent, la Cave coule une nouvelle vie.

Aussi accueillante, elle s'ouvre au passant.

Celle, celui qui en franchit le seuil est reçu en ami.

Les parois des cuves ont la couleur du vin et la chaleur du soleil.

On y respire encore l'odeur forte du travail du vin.

Sa voix est rires, chants et éclats de joie.

L'esprit du vigneron - créatif et passionné - l'anime jusque dans ses moindres recoins.

 

Ainsi, de cave, elle est devenue La Cave.

 

(texte écrit par Jean Dauriach)